Toutefois, il ne faut pas croire que les chaussures ne sacrifient qu'à la mode et au statut social de l'individu. Elles ont également des fonctions utilitaires. Par exemple ces fameuses chopines, arborées par les Vénitiennes au XVIe siècle, pour leur permettre de circuler dans Venise en dépit des inondations. Idem pour les caligas des légions romaines, ces sandales cloutées permettant aux soldats une meilleure résistance des pieds sur de plus longs trajets. Mais gare à ne pas se faire marcher sur les pieds !!! Au XIXe siècle d'ailleurs, un homme du nom d'Alexis Godillot (1816-1896) les remettra à l'ordre du jour dans les armées, remaniant le principe de la sandale pour lui donner l'apparence d'un bottillon ferré que l'on désignera ensuite sous le nom de godasse.
De ce godillot (ou godasse) naît, au cours des années 1940, dans l'atelier du docteur bavarois Klaus Maertens, une bottine orthopédique à coussin d'air, laquelle est ensuite récupérée par les manufacturiers de chaussures de Grande-Bretagne, vingt ans plus tard. C'est de ce modèle que l'on s'inspire pour créer la fameuse Doc Martens au bout d'acier, vers 1960. Destinée d'abord aux ouvriers des chantiers du Royaume-Uni, elle devient rapidement le chouchou des punks et des skinheads. Or à la grande satisfaction de plusieurs, la Doc Martens ne signe plus forcément les intentions révolutionnaires de ceux qui la portent.
De nos jours, la chaussure symbolise encore un mode de vie, un rang social, une identité vestimentaire… Elle représente un univers de création extraordinaire et incarne l'idéal à titre de véhicule d'expression propre à l'individualité de chacun. Elle permet d'identifier les intérêts d'une personne ou le type de métier qu'elle exerce : ballerines, baskets, boots, bottes de randonnée, bottines, charentaises, chaussures de ville, cuissardes, escarpins, godillots, mocassins, nu-pieds, talons hauts, tennis, tongs, etc. Bref, "dis-moi ce que tu chausses et je te dirai qui tu es !"